Bail commercial
Le loyer plafonné du bail renouvelé se calcule à partir du loyer initial, et non du loyer révisé. Le loyer révisé fixé par le juge au cours du bail ne constitue pas un motif de déplafonnement (Cass. Civ. 3, 11 avril 2019, n°18-14.252).
Conformément aux dispositions de l’article L.145-33 du Code de commerce, sauf modification notable d’un des éléments permettant de déterminer la valeur locative (articles L.145-33 et L.145-34, alinéa 1 et 2 du Code de commerce), le taux de variation du loyer applicable lors du renouvellement du bail (si sa durée n’est pas supérieure à neuf ans) ne peut excéder la variation de l’ILC ou de l’ILAT intervenue depuis la fixation initiale du loyer du bail expiré.
Dans cette affaire, un bailleur a sollicité une révision triennale du loyer. Puis, à l’expiration du bail, lors du renouvellement, il a demandé le déplafonnement du loyer au motif que le loyer avait été révisé au cours du bail. Subsidiairement, un désaccord est intervenu entre les parties sur les modalités de fixation du loyer plafonné.
Comme la Cour d’appel de Douai, la Cour de cassation a rejeté la demande de déplafonnement, considérant que la révision du loyer au cours du bail en application des dispositions légales ne constitue pas un motif de déplafonnement. Cette décision est conforme à la jurisprudence constante de la Cour qui considère que la modification du loyer ne constitue un motif de déplafonnement que s’il s’agit d’une modification conventionnelle, ce qui n’était ici pas le cas, la révision étant intervenue en application des dispositions légales.
Aux termes de cette même décision, la Cour de cassation a également jugé que, pour calculer le montant du loyer plafonné, le loyer à prendre en considération pour l’application de la variation indiciaire est le loyer initial, et non du loyer révisé.  Un rappel utile tant il est fréquent que les parties s’appuient sur le dernier loyer en vigueur au pour calculer le loyer plafonné, ce qui est une erreur !

Bail commercial
Sauf clause expresse prévue au bail, les travaux liés à la vétusté ne peuvent être imputés au locataire (Cass. Civ. 3, 9 mai 2019, n°18-14.123).
En vertu de l’article 1755 du Code civil, les réparations réputées locatives ne sont pas à la charge du locataire quand elles ne sont occasionnées que par la vétusté. Cette disposition n’est néanmoins pas d’ordre public.
Dans cette affaire, aux termes du bail, le locataire supporte l’entretien et les réparations autres que celles de l’article 606 du code civil. Le bailleur lui demande le remboursement de frais de réfection d’un emplacement de stationnement. Le locataire s’y refuse et une procédure judiciaire est engagée.
La Cour de cassation juge que, nonobstant la clause du bail mettant à sa charge l’entretien et les réparations autres que celles de l’article 606 du code civil, le locataire, ne peut être tenu des réparations qui sont la conséquence de la vétusté (ce qui était le cas ici), sauf stipulation expresse du bail.
L’attention est  à nouveau attirée sur la vigilance nécessaire à ce sujet lors de la rédaction du bail.

Bail commercial
Dès lors que l’impôt foncier est mis à la charge du preneur, son montant doit être déduit de la valeur locative calculée lors de la fixation du loyer du bail renouvelé (Cass. Civ. 3, 23 mai 2019, n°18-14.917).
L’impôt foncier peut être contractuellement à la charge du preneur. Une telle stipulation doit-elle prise en compte pour le calcul de la valeur locative ? La réponse est affirmative.
Dans cette affaire, lors du renouvellement du bail, la Cour d’appel de Colmar a fixé le loyer à la valeur locative en déduisant le montant de l’impôt de ladite valeur locative retenue.
La décision est validée par la Cour de cassation, rappelant que conformément aux dispositions de l’article R.145-8 du Code de commerce, les obligations incombant normalement au bailleur dont celui-ci se serait déchargé sur le locataire sans contrepartie constituent un facteur de diminution de la valeur locative.
Cette solution est conforme à la jurisprudence constante en la matière.

Bail d’habitation
Sauf lorsque la sous-location a été autorisée par le bailleur, les sous-loyers perçus par le locataire doivent être reversés au bailleur, car ils constituent des fruits civils qui appartiennent par accession au propriétaire (Cass. Civ. 3, 12 septembre 2019, n°18-20.727).
Dans le cadre d’une procédure aux fins de validation d’un congé pour reprise, le bailleur a constaté que le locataire avait, sans son autorisation, sous-loué le logement. Il a donc sollicité le remboursement des sous-loyers en exécution de son droit d’accession.
Liée au développement exponentiel de la location touristique meublée de courte durée, (dite « location AirBnB »), la solution adoptée par la Cour ouvre la possibilité pour le bailleur d’obtenir le versement de la totalité des sous-loyers perçus par son locataire en vertu des sous-locations consenties irrégulièrement !
Amenée à se prononcer pour la première fois sur cette question, la Cour de cassation rappelle que le propriétaire bénéficie du droit d’accession sur ce qui est produit par sa chose et considère que le locataire a, par l’effet de sa mauvaise foi caractérisé par le défaut d’obtention de l’autorisation du bailleur, perdu son droit de faire les fruits siens.
La Cour de cassation a attribué à cet arrêt la mention « FS.P+B+R+I », ce qui montre qu’il est destiné à une large diffusion, notamment dans le cadre de son rapport annuel, le sujet étant donc d’importance pour la Cour.
Il est en outre patent que cette solution a vocation à s’appliquer aux sous-locations de type « AirBnB », mais également aux autres baux (commerciaux, professionnels, civils…), dès lors que le locataire ne dispose pas du droit de sous-louer.

Copropriété
La résolution d’assemblé générale dispensant le syndic de l’ouverture d’un compte bancaire ou postal séparé doit préciser la durée de cette dispense(Cass. Civ. 3, 25 octobre 2018, n° 17-20.131).
En vertu de l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965, le syndic est tenu d’ouvrir un compte bancaire ou postal séparé au nom du syndicat des copropriétaires, sur lequel sont versées toutes les sommes reçues au nom ou pour le compte du syndicat. Toutefois, au sein d’une copropriété comportant au plus 15 lots, l’assemblée générale peut dispenser le syndic soumis à la loi Hoguet du 2 janvier 1970 ou dont l’activité est soumise à une réglementation professionnelle organisant le maniement des fonds du syndicat, d’ouvrir ce compte séparé.
Dans cette affaire, au sein d’une copropriété de moins de 15 lots, deux copropriétaires ont sollicité l’annulation d’une résolution d’assemblée générale dispensant le syndic d’ouvrir un compte bancaire ou postal séparé qui ne fixait pas la durée de ladite dispense.
La Cour de cassation fait droit à cette demande et relève que la résolution dispensant le syndic de l’obligation d’ouvrir un compte séparé doit fixer la durée pour laquelle cette dispense est accordée. A défaut d’une telle précision de durée, la décision d’assemblée générale des copropriétaires est nulle.

Copropriété
Un copropriétaire peut individuellement saisir le juge pénal avec constitution de partie civile pour voir sanctionner le copropriétaire ayant réalisé des travaux illégaux dans les parties communes (Cass. Crim. 19 mars 2019, n°18-83.833).
Au sein d’une copropriété, le propriétaire d’un logement situé au dernier étage a fait installer des fenêtres de type Velux sur le toit de l’immeuble, partie commune. Ayant relevé qu’aucune déclaration de travaux ou demande de permis de construire n’avait été déposée par celui-ci, un autre copropriétaire a porté plainte au pénal et s’est constitué partie civile contre le copropriétaire ayant fait exécuter ces travaux sans autorisation administrative, ce qui est passible de sanctions pénales en vertu des dispositions du Code de l’urbanisme.
La Chambre de l’instruction a estimé que le copropriétaire plaignant n’avait pas subi de préjudice personnel, direct et certain résultant de l’infraction, et qu’en conséquence, la constitution de partie civile était irrecevable.
La Cour de cassation censure cette décision : dès lors que les droits de tous les copropriétaires (parmi lesquels figurait la partie civile) avaient été atteints par la commission de cette infraction (ce que la Chambre de l’instruction reconnaissait elle-même !), la constitution de partie civile du copropriétaire plaignant était parfaitement recevable.
Gare donc au copropriétaire qui s’exonérerait des déclarations ou demandes d’autorisation d’urbanisme, car outre les recours dont dispose le syndicat des copropriétaires (qui donne généralement une autorisation de travaux sous réserve de respect des dispositions du droit de l’urbanisme), les autres copropriétaires bénéficient aussi individuellement de l’action pénale !

Vente immobilière – Agent immobilier
La rémunération de l’agent immobilier est due dès que la promesse synallagmatique de vente est signée et les conditions suspensives réalisées (Cass. Civ. 3, 10 octobre 2018, n°16-21.044).
Une promesse synallagmatique de vente a été signée par le vendeur et l’acquéreur, les parties devant ensuite réitérer la vente par acte notarié. L’acquéreur ayant décidé de renoncer à son achat (alors que les conditions suspensives avaient été réalisées), l’agent immobilier a saisi le juge pour obtenir le paiement de sa rémunération.
Alors que la Cour d’appel de Rennes a rejeté cette demande, au motif que l’acte notarié de vente n’avait jamais été signé, la Cour de cassation n’a pas la même analyse. Elle estime que la signature de la promesse synallagmatique de vente constitue un accord définitif sur la chose et sur le prix, et que l’acquéreur ne peut, sans commettre une faute, refuser de la réitérer. Considérant que la vente est effectivement réalisée, la Cour conclut que son refus ne peut en conséquence avoir pour effet de priver l’intermédiaire de son droit à rémunération ou à indemnisation.
La jurisprudence s’était déjà prononcée sur la question en octroyant des dommages et intérêts à l’intermédiaire (équivalents à sa commission) dans une telle situation. Ici, la Cour de cassation va plus loin puisqu’elle juge que c’est la commission elle-même qui est due, alors que la vente n’a pas été réitérée devant notaire.
Ainsi, la signature de l’acte authentique de vente ne serait plus une condition au droit à commission de l’intermédiaire, dès lors qu’une promesse synallagmatique est signée et les conditions suspensives réalisées.